Le risque pénal lors de l’octroi des subventions aux associations par les collectivités

Auteur : Aude Duchange Droit de la presse – Droit pénal – Droit pénal des affaires

Les collectivités sont libres d’accorder des subventions aux associations, leur permettant ainsi de contribuer à un projet préalablement défini en fonction de son objet social et qui présente également un intérêt général pour les collectivités.

Cependant, l’octroi d’une subvention n’est pas un droit pour les associations et doit répondre à certaines conditions.

La subvention est donc une contribution de la collectivité à l’association qui peut se faire en espèce ou en nature.

S’agissant des deniers publics, il est impératif pour la collectivité de procéder à des vérifications lors de l’octroi des subventions, à défaut desquelles sa responsabilité pénale serait susceptible être engagée.

Deux périodes peuvent engendrer un risque pénal important.

1. Le risque pénal lors de la prise de décision permettant à l’association de bénéficier de la subvention

Cette décision doit être votée par l’organe délibérant de la collectivité.

Pour cela, il apparait essentiel que les membres de l’organe délibérant disposent préalablement du projet associatif détaillé afin de vérifier qu’il est conforme à l’objet social de l’association, d’une part, et qu’il peut servir l’intérêt public local, d’autre part.

     a) Risque de détournement de fonds publics

Un premier risque pénal peut émerger dans le cas où la collectivité vote l’octroi d’une subvention pour un projet ne répondant pas à ces deux conditions que sont la conformité à l’objet social de l’association ainsi que le fait d’offrir un bénéfice à la collectivité.

Dans cette hypothèse, le délit de détournement de fonds publics, réprimé à l’article 432-15 du Code pénal, serait susceptible d’être caractérisé.

Il convient de préciser que la subvention ayant été accordée par la collectivité, par une décision prise par son organe délibérant, il apparait que la responsabilité de la commune, personne morale pourrait être retenue.

     b) Risque de prise illégale d’intérêts

Un second risque pénal est également envisageable si l’un des membres de l’organe délibérant justifie d’un lien quelconque, de manière directe ou indirecte, avec l’association.

Celui-ci serait alors susceptible d’être poursuivi du chef de prise illégale d’intérêts (art.432-12 Code pénal).

A noter que les poursuites de ce chef ne supposent pas de démontrer que l’auteur ait retiré un bénéfice matériel au sein de sa fonction au sein de l’organe délibérant ou de l’association.

La simple participation au vote afin de subventionner une association avec laquelle l’élu justifie du moindre lien, et alors même que la collectivité n’aurait subi aucun préjudice, suffit à caractériser le délit de la prise illégale d’intérêts.

Le législateur a toutefois prévu une exception, considérant que « dans les communes comptant 3 500 habitants au plus, les maires, adjoints ou conseillers municipaux délégués ou agissant en remplacement du maire peuvent chacun traiter avec la commune dont ils sont élus pour le transfert de biens mobiliers ou immobiliers ou la fourniture de services dans la limite d’un montant annuel fixé à 16 000 euros. » (art. 432-12 ali. 2 C. Pen.)

Afin d’éviter ce risque pénal, l’élu justifiant d’un lien direct ou indirect avec l’association devra s’abstenir de toute participation au vote de la décision d’octroi de la subvention (en quittant la salle du conseil dès que le point est appelé à l’ordre du jour, et sans laisser de procuration), mais également à la préparation de la décision (en s’abstenant de siéger lors de la séance de commission lors de laquelle le point est évoqué).

2. Le risque pénal lors de l’usage de la subvention par l’association pour son projet

Dans l’hypothèse où la subvention est accordée par l’organe délibérant de la collectivité, cette dernière doit procéder à un contrôle du bon usage de la subvention par l’association.

     a) Comment s’assurer du bon usage d’une subvention ?

En ce sens, l’article L.1611-4 du Code général des collectivités territoriales impose à l’association de procéder à un compte-rendu auprès de la collectivité sur l’usage des fonds et la réalisation du projet défini.

A défaut, si la collectivité ne dispose pas des éléments justificatifs suffisants et observe que l’usage des fonds ne correspond pas au projet initial, et donc ne sert pas l’intérêt public, elle est alors en droit de demander à l’association le remboursement des fonds versés.

Si l’association est donc contrainte de justifier du bon usage de la subvention dont elle a bénéficié, la collectivité ne doit pas rester passive, notamment dans l’hypothèse où l’association ne s’exécute pas spontanément.

Ainsi, la carence de la collectivité dans le contrôle de l’usage de la subvention est susceptible de caractériser le délit de détournement de fonds publics par négligence, réprimé à l’article 432-16 du Code pénal :

« Lorsque la destruction, le détournement ou la soustraction par un tiers des biens visés à l’article 432-15 résulte de la négligence d’une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, d’un comptable public ou d’un dépositaire public, celle-ci est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »

     b) La caractérisation du détournement de fonds publics par négligence

Cette infraction peut donc être caractérisée dès lors qu’un agent ou un élu a rendu possible, par un défaut de contrôle, le détournement par l’association des fonds qui lui ont été octroyés par la collectivité dans le cadre du subventionnement de ses projets.

Il peut s’agir pour l’association d’avoir utilisé les fonds à d’autres fins que celle du projet annoncé ou encore d’avoir rétrocédé la subvention à une autre association en méconnaissance des dispositions de l’article L.1611-4 alinéa 3 du CGCT.

Dans une telle hypothèse, outre la mise en cause de l’association, pourrait pénalement être poursuivi l’agent ou l’élu chargé du contrôle après octroi des subventions telle que l’adjoint au maire en charge de la vie associative, voire le Maire lui-même qui se doit de vérifier le bon usage des deniers publics.

Eu égard à ces observations, il est donc essentiel pour la collectivité souhaitant subventionner une association de procéder à certaines vérifications préalables au moment du vote de la décision d’octroi, mais également postérieurement sur l’utilisation conforme des fonds à la destination annoncée, afin d’éviter de se voir reprocher la moindre négligence.

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